La fête du vélo (rapport de ma tournée)

J'avais eu l'information de la fête du vélo par Jean-Jacques, le sympa patron de l'Arrêt public à Briollay,  il m'avait dit: "Tu pourrais jouer là-bas!", et je m'étais dit que ça pourrait être chouette, et ce le fut. Il faut dire que, avec ou sans guitare, la levée de la Loire est un régal pour les yeux, et alors, sans voitures, c'est encore mieux!

Mon premier arrêt fut à la Bohalle. Là, il y avait un stand avec vente de fouaces et de boissons. Devant des adultes observateurs, voire interrogateurs ou en retrait, j'ai joué mon pas si passe-partout que ça I love le vélo. J'ai été applaudi. Après, j'ai eu la joie de voir un petit attroupement d'enfants de 7-10 ans autour de moi. C'est l'un d'eux qui m'a fait remarqué qu'il y avait quelques pièces sur ma housse de guitare. Ils étaient super contents. Alors que je ne trouvais pas que je jouais aussi bien que d'autres fois,  un enfant m'a dit: "Tu joue bien de la guitare dis-donc". Un autre: "Et t'as une belle voix".  Un enfant était émerveillé d'apprendre qu'on pouvait jouer deux instruments à la fois: la guitare et l'harmonica.  Je leur ai joué de mon bestiaire: Petite histoire d'escargots, Chat pas chat pacha, L'otarie, qui a eu un grand succès, et que j'ai joué deux fois. Ils se sont même assis à un moment donné. Ce qui m'a le plus touché, c'est quand l'un deux m'a dit avec coeur: "Je me souviendrais toujours de ce jour". Les enfants un moment donné, enthousiasmés, m'ont proposé de chanter plus près des tables, et pour ce faire m'ont aidé à transporter mes affaires (pupitres, cahiers...). Cependant, ils ont dû être déçus lorsqu'ils ont vu le peu de retour du public adulte... Il faut dire que c'était trop bruyant, mais peut-être aurais-je dû sortir ma boîte magique à chansons qui créer une proximité, une interaction qu'il n'y a pas sinon quand j'ai le nez dans mon pupitre. 

 Au moment de partir pour Saint-Mathurin, j'ai vu un groupement de vélo le long de la levée. J'ai demandé si ils voulaient que je chante pour eux ma chanson I love le vélo. Ils m'ont répondu non, qu'ils l'avaient déjà entendu. Je me suis dit alors que cette chanson était moins passe-partout que celles de Bourvil et Montant sur la bicyclette, et qu'elle pouvait déranger. Pourtant, j'ai changé: "en croisant une belle paire de lolos" par "en croisant une belle paire de hellos!"

Ensuite, j'ai  pédalé en me régalant du sauvage et romantique paysage ligérien. Si bien que je m'arrêtais régulièrement. Et lors d'un de ces arrêts, j'ai vu un couple marcher en bas, sur le chemin de terre longeant le fleuve. Je leur ai parlé un peu et leur ai proposé de chanter une chanson pour eux. Et j'ai chanté La Vague, sur le muret de la levée, face à la Loire. Merveilleux! Ils ont applaudi d'en bas, en disant que c'était une très belle chanson et m'ont conseillé d'aller jouer au Port Saint Maur à la Ménitré.

En attendant, j'ai fait escale à Saint-Mathurin, car à ma gauche, je vis un stand et deux demoiselles de couleur faire debout sur une chaise les poms-poms girls, chantant et saluant les cyclistes qui passaient sur la levée. J'ai donc devant plusieurs personnes joué I love le vélo, les demoiselles frappant dans leur main pour marquer le rythme, je les ai entendu faire un ouh-ouh en riant au passage des "hellos". Ce petit partage fut ma foi très agréable. Le fait de parler un peu aux adultes du stand a permis une approche moins frontale. J'ai dit que c'était une chanson où j'avais fait de l'humour et qui était pleine de bonne humeur. Après, elles n'étaient sans doutes pas bloquées comme d'autres.

 Après cela, je suis allé au Port Saint-Maur. En fait il s'agissait d'un café de camping. J'ai préféré me reposer en attendant le bateau que le couple à qui j'ai chanté La Vague, et que je revis là-bas, m'avaient conseillé de prendre. Ce bateau de touriste transportant aussi les vélos! nous a transporté jusqu'au Toureil. Là serait ma dernière étape d'animation. La plus longue. Je me suis d'abord bien reposé. Un moment donné, je suis allé dans une petite église à côté du café. Un homme qui était à l'intérieur est sorti en disant "le troubadour". Je me suis retourné. Il parlait bien de moi. Il m'a demandé si je priais. J'ai répondu: "Euh...Je médite" Ce qui est une forme de prière en fait.

 Je me suis allongé sur un muret. Des gens d'une trentaine étaient à côté de moi, et quand je me suis levé pour aller aux toilettes avant de jouer, j'ai entendu:  "Votre veste!..." Je l'avais oublié. A mon retour, je leur ai dit: "ça va, c'était pas ma guitare." Et je leur ai proposé de leur chanter I love le vélo, qu'ils ont beaucoup apprécié. Il y avait deux hommes, une femme asiatique et un enfant typé asiatique. La femme asiatique a ri sur "hellos". J'ai vu à un bref regard, qu'elle avait ressenti mon être, qu'il y avait eu une vibration au niveau de l'âme.

 Ce petit apéro effectué, j'ai demandé à la patronne et au patron du bar si je pouvais jouer: ils ont accepté, m'ont proposé une place à l'abri du vent. Ce qui est drôle, c'est que je m'étais dit que je devrais toujours commencer par chanter La Vague, où que je sois, pour que le public m'adopte plus facilement, et que donc j'ai commencé par ma pièce maîtresse; mais pas d'applaudissements à la fin... ça commençait mal!... Peut-être qu'en fait j'aurais dû créer un lien avec le public en me présentant. Mais je n'en étais pas à ce stade de réflexion. J'ai enchaîné avec Monsieur Troubadour, l'harmonica bien présent. J'ai senti curieusement un peu plus d'intérêt, mais pas d'applaudissements. Après, il faut relativiser, j'ai appris à la fête de la musique le 21 juin que ce n'était pas parce que les gens n'applaudissaient pas qu'ils n'appréciaient pas. Je pense que les gens ne s'attendaient pas tout d'un coup à être devant de la chanson à texte qui interpellait, et non pas un musicien de guinguette passe-partout. J'ai ensuite joué Petite histoire d'escargots. Là, des applaudissements à ma gauche. Je décide de lancer mon jeu de la boîte magique à chansons et de commencer par la table des applaudissements repérés.

Une jeune fille, Diane, qui était là avec ses parents a répondu d'emblée à l'offre. Après explications du jeu, elle a tiré avec joie un papier. Elle a lu: Je t'attends. "C'est exactement ça" a t-elle dit toute contente, avant même que je chante la chanson. Elle a dit à la fin que l'ampoule avait failli exploser. Je l'ai senti vraiment heureuse, et que ça avait vraiment répondu à un besoin. Pourtant, je ne l'avais jamais chanté aussi mal; ma voix n'était pas posée comme d'habitude, gêné par les conversations autour sans doute. Juste devant elle avec mon pupitre, je l'ai invitée par contre à faire les choeurs (les "mmmh"), qu'elle a fait avec coeur, malgré que je l'entendais à peine (normal, puisque ma voix avait elle-même du mal à percer). Mais l'essentiel est que la chanson ait répondu clairement à un besoin. Il y a eu comme une communion d'âme aussi. Elle m'a remercié chaleureusement et donné de sa poche 4 euros. Je l'ai remercié de sa générosité.

J'allai proposer à la table d'à côté. Un jeune d'environ 18 ans se présentant sous le nom de Jonathan se prêta avec un grand plaisir au jeu. Le bleu de ses yeux pétillait. Mon neuvième participant tira un papier et me présenta le titre: Oh my love I have no words.  A la fin, il a déclaré  l'ampoule allumée. Même qu'elle allait exploser! Il me dit que je chantais bien, que c'était impeccable (malgré que je l'ai chanté beaucoup mieux, mais il ne le savait pas...)

 Ma dixième participante au jeu, d'une autre table, s'appelait Laurence et était âgée d'environ de 40 à 50 ans. A ma grande surprise, elle tira Dans ma maison -  la première chanson que j'ai composé (sur un accord); mais surtout une chanson loufoque. Je lui dit avant de commencer: "Vous aimez le loufoque?" Elle a répondu oui. Elle a bien aimé en effet, et a ri avec conjoint et ami. A la fin, elle a déclaré l'ampoule allumée. Et elle m'a donné généreusement un billet de 5 euros!

La 11ème participante s'appelait Armelle, âgée entre 50 et 60 ans, accompagnée de son conjoint apparemment. Je fus non moins surpris quand elle tira de la boîte le papier sur lequel je lus: Amour de troubadour. Une chanson très spéciale qu'on peut écouter sur mon blog histoiredegratte.canalblog.com. La femme a déclaré l'ampoule non allumée... Le contraire m'aurait étonné! Mais je me suis posé la question de la cause. Ce jeu, je le croyais infaillible, il l'avait été jusqu'à 10 et là... hic!  Je me suis dit que soit cette ancienne chanson n'était pas assez universelle et était à retirer de mon jeu, soit elle lui correspondait, mais qu'elle a préféré préserver son jardin secret (elle a le droit) devant son conjoint que j'avais vu sourciller - soit ma chanson ne lui a pas correspondu et alors mon jeu n'est pas faillible à 100 %. Même dans ce cas, on aurait du 90% de réussite. Il faut cependant attendre plusieurs dizaines avant de tirer des conclusions. En tout cas, ma onzième participante m'a dit que je chantais bien, alors que je ne l'ai jamais aussi mal chanté (d'une part cela faisait très longtemps la dernière fois, mais surtout, la tonalité de ma guitare étant plus haute que du temps où j'ai composé cette chanson, et ma voix, donc, trop aiguë). Je ne fus pas moindrement surpris qu'elle me donne en plus 4 euros!

 Bref, le bilan est plutôt positif pour cette nouvelle session de la boîte magique à chansons. Certes, il y en a toujours qui refusent de jouer au jeu, des personnes très fermées en général et qui ont peur de se trouver devant une vérité qu'ils ne veulent pas voir. Ainsi un vieux monsieur. J'ai dit que c'était son choix, qu'elle avait droit; mais j'espère une prochaine fois arriver à casser la carapace de ce genre de personnes.

Après, j'ai demandé à manger. On m'a proposé une assiette de charcuterie. Ils n'avaient que ça. Et j'ai commandé une bière. La belle serveuse m'a déclaré à la fin que celle-ci m'était offerte.

Content de mon expérience, j'ai pédalé face à une nuée de moucherons en direction de Saint-Rémy La Varenne. Au bord de la Loire, j'ai fait une pause en regardant plein de gratitude et d'émerveillement le soleil se coucher dessus.

Aube de l'Étoile